Anus Mundi
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Le Dixième Cercle, L'anus du Monde
De Daniel Zimmermann. 1997.
Voila un livre que j'aurai adoré etudié au lycée ou à la fac, tant son thème
principal est clair et précis tout au long de l'œuvre : La merde.
La fiente, la chiure, l'excrément, la déjection. Dévoilé, développé sous toute
ses formes, sous tout ses noms. La merde que l'on bouffe et celle que l'on
chie. Celle qu'on évite et celle ou on se noie. Celle qu'on ne regarde pas et
celle qui nous souille les yeux.
"J'en vis un
dont la tête était si souillée de merde qu'on ne pouvait savoir s'il était
clerc ou laïc"
Dixit Dante, dans son Enfer de la Divine
Comedie.
Car le voyage de François, Juif athée, Normalien, dans les camps de
concentrations Nazi au milieu de ses congénères juifs, c'est le voyage de
Dante, au travers des multiples cercles de l'enfer. L'étudiant préparant sa
thèse d'état sur l'auteur Italien du XIV ème siècle va sentir dans sa chaire
toute l'horreur cruelle et exhaustive du catalogue des péchés et châtiments de
l'enfer dans l'Allemagne de la seconde guerre mondiale. Dans un camps ou il
apprendra bientôt que la culture et les diplômes ne sont rien, et que la
juifitude qu'il a renié depuis toujours est la seule valeurs sur laquelle il sera jugé.
A l'instar d l'Œuvre du poète, Daniel Zimmermann déploie sous nos yeux le large
éventail des vices de l'humanité, avec un luxe de détail, de froideur et de
cynisme éprouvant. Torture, viol, soumission physique et mentale, trahison,
infanticide, homicide, déicide, le héros traverse la fange humaine, essayant de
garder la tète en dehors. La fange, déversé par par la cruauté des S.S, par les
diarrhéiques prisonniers qui chient une merde putride d'un bout a l'autre du
roman, laquelle merde est fouillée, analysée, collectée, entassée, revendue...
Rien ne se perds rien ne se créé, et l'amassement d'immondices est proportionnel
a la cupidité et la monstruosité de l'homme.
Profondément encré dans la réalité artistique, le dixième cercle, l'anus du
monde multiplie les références a la littérature, la musique... Chaque nouveau
cercle que franchi François dan sle campo Nazi est une étape , et chaque étape
apporte sa nouvelle citation de Dante, cheminant en parallèle dans son Enfer utopique.
De ce point de vue, la couverture de l'edition Folio est très bien choisit : un
détail de Saturne, de Goya.
Saturne, dévorant un de ses enfant. Saturne, aux yeux exorbités, aux corps squelettique, tel un prisonnier du camp, mangeant sa propre chaire, comme les prisonniers vendaient leurs propres congénères afin d'avoir a manger. Le thème de la nourriture st indissociable du thème de l'excrément dans le roman. Il faut manger, c'est une nécessité, une obsession même pour ces prisonniers sous-alimentés. Mais tout ce que l'on mange, on doit le déféquer, et c'est rajouter a cet océan nauséabond dans lequel pataugent les âmes damnées du camp nazi.
Morceau choisit :
"En quelques
heures, François a rattrapé tout le courrier en retard. Hans le parcourt,
demain matin il l'apportera pour signature à Kramer, le commandant S.S. du
camp. En attendant, la vie est belle tant qu'on est pas mort, donc un petit
en-cas pour patienter jusqu'au souper, et on y va. François s'excuse, un besoin
pressant, il se dirige vers la sortie. Hans le rappel, inutile d'aller se les geler
au bord du gouffre collectif, les cadres ont quand même la possibilité de se
les garder au chaud. A peine François à-t-il franchit la porte des toilettes
spéciales ou l'a conduit un scribe, qu'il reçoit un coup de poing en plein
visage, ici on ne mélange pas la chienlit des Juifs aux excréments des aryens. Sonné,
il repart; Hans explose en jurons à l'énoncé de cette ségrégation, il saisit
son fouet, ordonne à François de le suivre, pénètre en trombe dans la pièce réservé
aux déjections de luxe/
- le maitre de la merde, ici !
le préposé s'approche, il a compris. Il se déculotte, se met a plat ventre,
compte les coups. Hans n'y va pas de main morte et tonitrue, au prochain
manquement a son autorité, se sera l'infirmerie, là ou on n'a pas mal au cul,
mais au cœur.
- Debout maintenant et tache de trouver a mon secrétaire du papier de soie,
non, de la soie véritable débrouille-toi !
François s'installe sur l'une des multiples caisses en bois percé d'un trou.
mélange d'odeurs, heureusement dominé par celles des cigarettes et des beignets
de pomme de terre en cour de cuisson. des hommes discutent, marchandent,
paient, troquent, le latrines du "canada"' sont tout a la fois une
foire à la brocante et un marché alimentaire."